Paris, 14 déc 2015 (AFP) – Attentat à la grenade contre une épicerie casher
de Sarcelles en 2012, projets d’attaques contre des militaires, départs vers
la Syrie: vingt jihadistes présumés de la cellule de Cannes-Torcy seront jugés
par la cour d’assises spéciale.
Trois ans avant les attentats meurtriers de Paris, cette cellule avait été
présentée par les services antiterroristes comme l’une des plus dangereuses
opérant en France depuis les attentats de 1995.
Tout commence le 19 septembre 2012, jour de la parution de nouvelles
caricatures de Mahomet dans Charlie Hebdo, à Sarcelles, en banlieue
parisienne. Vers 12H30, deux hommes, capuches sur la tête, entrent dans une
épicerie casher et y jettent une grenade avant de prendre la fuite. Un seul
client est légèrement blessé. Un miracle, car l’engin a explosé sous une
rangée de chariots.
L’enquête démarre vite. Une empreinte génétique est retrouvée sur la
cuillère de la grenade. Elle appartient à Jérémie Louis-Sidney, un délinquant
connu pour ses liens avec la mouvance salafiste. Dans son entourage apparaît
Jérémy Bailly, originaire de Torcy (Seine-et-Marne).
Décrit par des proches comme un « fanatique », Louis-Sidney meurt le 6
octobre 2012, tué par des tirs de réplique des policiers venus l’interpeller à
Strasbourg.
Dans le box utilisé par Jérémy Bailly à Torcy, les policiers retrouvent du
matériel nécessaire pour fabriquer des bombes, des armes et des munitions.
Devant le juge, Jérémy Bailly n’a pas caché ses projets: tout cela devait
servir à « fabriquer une bombe ». Les cibles? « Les militaires », « les juifs » ou
« les francs-maçons ».
Il a cependant nié sa participation à l’attentat de Sarcelles, même si l’un
de ses complices l’a désigné comme ayant agi avec Louis-Sidney, disant que le
lieu avait été choisi car « seuls des juifs y rentraient ». Les enquêteurs
avaient aussi saisi chez Bailly une liste d’associations juives. Agé de 28
ans, Jérémy Bailly sera aussi jugé pour le braquage d’un restaurant de Noisiel
(Seine-et-Marne) le 1er octobre 2012.
– Aller-retour en Syrie –
Des membres du groupe étaient originaires de Torcy. Mais les enquêteurs ont
découvert des liens avec d’autres jeunes radicalisés de Cannes, au profil
parfois inattendu, comme cet ancien footballeur prometteur dont la carrière a
été brisée par une blessure et qui a finalement bénéficié d’un non-lieu.
En juin 2013, l’enquête prend une nouvelle tournure quand un projet
d’attentat contre des militaires, prévu dix jours plus tard, est dénoncé à la
police.
Connu des enquêteurs pour ses liens avec la cellule, Maher Oujani, né en
1988, est arrêté. Soupçonné de s’être procuré une arme, il est renvoyé aux
assises spéciales avec trois complices présumés pour ce projet d’attentat. Il
nie toute intention terroriste. L’un de ses complices avait été vu effectuant
des repérages près d’une caserne du sud de la France.
Trois hommes avaient aussi échappé au coup de filet initial. Ils étaient
partis en Syrie quelques jours avant, alors que les groupes jihadistes
prenaient de plus en plus d’importance dans le pays.
Les deux qui sont revenus, Ibrahim Boudina et Abdelkader Tliba, finalement
arrêtés début 2014, sont renvoyés pour un autre projet d’attentat à leur
retour en France. Dans les parties communes de l’immeuble de
Mandelieu-La-Napoule (Alpes-Maritimes) où s’était installé Ibrahim Boudina,
les policiers ont retrouvé deux chargeurs garnis et des explosifs. Le
troisième homme, resté en Syrie, aurait gravi les échelons au sein des
jihadistes francophones de l’État islamique (EI), l’organisation qui a
revendiqué les attentats du 13 novembre à Paris.
Parmi les vingt qui sont renvoyés aux assises spéciales, dix sont en
détention provisoire, sept sont libres sous contrôle judiciaire et trois sont
visés par un mandat d’arrêt, dont deux soupçonnés d’être en Syrie.
La date du procès n’est pas fixée.
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