Vingt-sept personnes, dont des touristes étrangers, ont été tuées vendredi lorsqu’un homme armé a ouvert le feu dans un hôtel de la station balnéaire de Sousse, le pire attentat de l’histoire récente de la Tunisie.
Cette attaque frappe un pays qui voit monter la menace jihadiste depuis sa révolution en 2011 et survient près de trois mois après l’attaque sanglante contre le musée du Bardo à Tunis, qui avait déjà porté un coup dur au secteur vital du tourisme.
Il intervient aussi le même jour que deux autres attaques liées à la mouvance jihadiste, l’une contre une mosquée chiite au Koweit, qui a fait au moins 13 morts et a été revendiquée par le groupe Etat islamique, et l’autre en France, où un homme est mort décapité.
Selon le porte-parole du ministère tunisien de l’Intérieur, Mohamed Ali Aroui, un homme armé « s’est infiltré par l’arrière de l’hôtel et a ouvert le feu ».
Le bilan est de « 27 morts et parmi eux figurent des touristes », a dit à l’AFP M. Aroui, sans pouvoir fournir de précisions pour l’instant sur leur nationalité.
L’auteur de l’attentat est un étudiant tunisien inconnu de la police, a annoncé vendredi le secrétaire d’Etat aux affaires sécuritaires, Rafik Chelly.
« Il est Tunisien, originaire de la région de Kairouan (l’une des villes saintes de l’islam, située dans le centre de la Tunisie, ndlr). C’est un étudiant », a déclaré le responsable à la radio Mosaïque FM. « Cette personne n’était pas connue (de nos services) », a-t-il ajouté.
L’hôtel visé est le Marhaba et se situe dans la zone touristique de Port el Kantaoui, aux abords de la ville de Sousse.
Henda Chebbi, une responsable du ministère de la Santé, a dit à la radio Mosaïque FM que 12 personnes avaient également été hospitalisées « avec des blessures de gravité diverse ».
M. Aroui, d’après qui l’opération est encore en cours, n’a pas écarté que l’attaque ait été menée par plus d’une personne.
« C’est une attaque terroriste contre l’hôtel. L’auteur de l’opération a été abattu mais (…) il pourrait y en avoir davantage. Qu’il y ait d’autres éléments avec lui, nous ne pouvons ni le confirmer ni l’infirmer » pour l’instant, a-t-il dit à la télévision nationale.
La Tunisie disait craindre des attentats à l’approche de la saison touristique et avait annoncé des mesures sécuritaires accrues. Des menaces provenant de comptes sur les réseaux sociaux liés à la mouvance jihadiste avaient menacé de nouvelles attaques durant l’été.
-‘Calme mortel’-
Un touriste britannique a indiqué à la télévision SkyNews que l’attaque s’était produite vers midi (11H00 GMT).
« Mon fils de 22 ans venait de retourner se baigner (…) quand on a vu à une centaine de mètres à notre gauche ce qu’on pensait être des feux d’artifices », a raconté Gary Pine, venu de Bristol, dans le sud-ouest de l’Angleterre. « C’est seulement quand on a commencé à entendre des balles fuser qu’on a réalisé que c’était beaucoup plus grave que des feux d’artifice ».
« Il y a eu un exode massif de la plage (…) et il y a eu quelques blessés légers dans le choc ou la panique », a-t-il ajouté. « J’estime avoir entendu une vingtaine ou une trentaine de coups de feu, il y en avait pas mal ».
« Je suis maintenant à la réception avec environ 200 autres clients étrangers. Doit-on partir? Où aller? C’est d’un calme mortel maintenant », a-t-il encore dit.
L’ambassade de France à Tunis a appelé ses ressortissants par SMS à la vigilance et à « limiter les déplacements et à éviter les rassemblements ».
En 2013 (BIEN: 2013) un kamikaze s’était fait exploser sur une plage de Sousse, mais sans faire de victimes.
Cette nouvelle attaque survient un peu plus de trois mois après l’attentat sanglant contre le musée du Bardo à Tunis, revendiqué par l’EI. 21 touristes et un policier tunisien avaient péri dans cette attaque menée le 18 mars.
Après cet attentat, le secteur stratégique du tourisme a enregistré en avril de très mauvais résultats, avec un recul sur un an de 25,7% du nombre de touristes et de 26,3% des recettes en devises.
Le tourisme, qui représente environ 7% du PIB de la Tunisie et près de 400.000 emplois directs et indirects, était déjà très affecté par les crises politiques à répétition et l’essor de la mouvance jihadiste qui ont suivi la révolution de janvier 2011.
La ministre du Tourisme, Salma Rekik avait annoncé en avril des « mesures exceptionnelles » pour renforcer la protection des sites et circuits ainsi que des contrôles dans les aéroports, les routes et tous les moyens de transport.
La Tunisie, pionnière du Printemps arabe, a malgré les turbulences achevé sa transition avec des élections fin 2014, mais sa stabilité pourrait être menacée par l’essor de la menace jihadiste.
Depuis la révolution de 2011, le pays fait face à l’essor d’une mouvance jihadiste, en particulier à la frontière avec l’Algérie où des heurts réguliers ont lieu entre hommes armés et militaires.
Des dizaines de soldats et policiers ont été tués ces quatre dernières années dans des affrontements et des embuscades, la majorité dans la région du mont Chaambi (centre-ouest) où se trouve le principal maquis jihadiste en Tunisie.