Le tribunal administratif de Paris examine
mercredi trois demandes de levée d’interdiction de sortie de territoire, les
premières depuis la loi antiterroriste de novembre 2014 destinée à entraver
les départs de Français candidats au jihad en Syrie.
A 16 ans, elle s’est convertie à l’islam après différentes rencontres avec
des personnes de confession musulmane, explique son avocat François Zind.
Aujourd’hui, cette Mulhousienne de 22 ans, qui dit vouloir quitter la France
pour suivre des études de théologie dans une faculté réservée aux femmes en
Arabie saoudite, se voit dans l’impossibilité de quitter la pays en raison
d’une interdiction administrative de sortie de territoire prise à son encontre.
Pour son avocat, aucun « élément concret » ne vient pourtant motiver cette
mesure qui, selon lui, contrevient par ailleurs « au traité de l’Union
européenne sur la liberté de circulation ».
En mars, la demande de passeport de la jeune femme pour aller étudier en
Arabie saoudite lui avait été refusée en vertu de la loi du 19 novembre 2014,
après que sa mère eut signalé son changement de comportement aux autorités.
– Une première depuis la loi antiterroriste –
Cette loi dite « antiterroriste » instaure une interdiction de sortie de
territoire d’une durée de six mois renouvelable jusqu’à deux ans en cas de
« raisons sérieuses de croire » que la personne « projette des déplacements à
l’étranger ayant pour objet la participation à des activités terroristes » ou
« sur un théâtre d’opérations de groupements terroristes ».
Cette mesure avait été prise pour faire face à la multiplication des
départs de Français candidats au jihad en Syrie, dont les autorités redoutent
qu’ils puissent ensuite commettre des attentats à leur retour, comme ce fut le
cas notamment de Mehdi Nemmouche, principal suspect de la tuerie de mai 2014
au Musée juif de Bruxelles.
Selon le ministère de l’Intérieur, 108 interdictions de sortie de
territoire ont été prises en vertu de cette loi.
473 jihadistes français sont actuellement dans les zones de combats
irako-syriennes, selon les autorités.
La jeune convertie de Mulhouse fréquente une association musulmane de
soutien scolaire, « Langue et horizon », qui a une application « stricte et
orthodoxe » de la religion, explique son avocat. Pour autant, elle « n’envisage
pas du tout de partir faire le jihad en Syrie », assure Me Zind.
L’association, « proche des mouvements salafistes et de l’Arabie saoudite »,
selon lui, a été frappée par un arrêté de fermeture de la ville de Mulhouse,
finalement annulé en février par la tribunal administratif de Strasbourg en
raison de « l’atteinte portée à la liberté d’association ».
« Sauf à prouver que l’Arabie saoudite est un pays à risque, théâtre
d’opérations terroristes, aucun élément factuel » ne vient étayer cette
interdiction de sortie territoire, plaide encore l’avocat. « Sinon, toute
personne allant faire le pèlerinage à la Mecque est susceptible d’être
concernée », estime le conseil pour qui la religion de sa cliente « relève de la
liberté de conscience ».
Deux autres dossiers similaires seront étudiés mercredi par le tribunal
administratif de Paris, seul compétent dans ce domaine. Le tribunal mettra sa
décision en délibéré, quelques jours seulement après l’attentat de vendredi
contre une usine dans l’Isère.
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