Toulouse, 19 mars 2015 (AFP) – Toulouse a honoré jeudi avec ferveur les
personnes que Mohamed Merah a assassinées il y a trois ans à Toulouse et
Montauban, et l’hommage s’est mué en une mobilisation contre l’obscurantisme,
face à la multiplication des attentats des derniers mois, de Paris à Tunis.
Deux mois à peine après la tuerie de Charlie Hebdo et celle de
l’Hypercacher de Paris, qui ont fait 17 morts, une vingtaine de touristes sont
morts mercredi dans le musée du Bardo à Tunis, sous les balles de jihadistes.
« Ils sont la mort, nous sommes la vie; ils sont la nuit, nous sommes le
jour; nous continuons debout, fiers de vivre en France, d’être républicains,
juifs, démocrates », résumait jeudi matin une mère d’élève, Myriam, à l’issue
de la cérémonie organisée à l’école juive Ozar Hatorah (rebaptisée Ohr Torah)
en hommage aux trois enfants juifs et au père de deux d’entre eux, tués par
Merah le 19 mars 2012.
Mohamed Merah, un jeune délinquant toulousain de 23 ans, s’était lancé dans
une série d’attentats jihadistes. Il avait successivement tué trois militaires
dont deux musulmans, le 11 mars 2012 à Toulouse puis à Montauban le 15, avant
d’attaquer l’école juive à l’heure de la rentrée, le 19 mars.
Lors du rassemblement de près de deux mille personnes le soir à la Halle au
grains de Toulouse, la présidente régionale du Crif (Conseil représentatif des
institutions juives de France), Nicole Yardeni a souligné que cette journée
portait un message de « mobilisation contre l’obscurantisme »
« On nous disait Mohamed Merah est un loup solitaire, mais l’Histoire nous a
donné raison: il était le tenant d’une idéologie mortifère, qui porte la
négation même de l’idée de culture », a-t-elle ajouté.
« Face à cette obscurité je suis fière d’avoir vu la République se lever le
11 janvier » a-t-elle lancé à l’unisson avec le président de la communauté
juive toulousaine Arié Bensemhoun.
« C’est la guerre de la barbarie contre la civilisation », a ajouté M.
Bensemhoun, tandis que le maire de Toulouse, Jean Luc-Moudenc, en appelait,
face aux « répliques sismiques » des meurtres de Merah, à lutter contre le
« nazislamisme », une formule chère à Bernard Henri-Levy.
– Le combat passe par l’école –
La ministre de l’Education, Najat Vallaud-Belkacem, et le ministre de
l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, avaient apporté leur pierre à la lutte contre
l’obscurantisme dans l’après-midi d’abord dans une école de la région
toulousaine au côté de Latifa Ibn Ziaten, mère de la première victime de
Merah, venue justement « faire passer le message du vivre ensemble » auprès de
25 élèves de CM2.
Les deux ministres avaient ensuite signé à la préfecture une « Charte de la
fraternité », paraphée par les représentants toulousains de six grandes
religions. « Cette charte est une magnifique occasion de tracer un chemin », a
souligné Bernard Cazeneuve en ajoutant: « C’est notre projet commun, c’est par
la République qu’on combattra la haine. Elle doit être forte dans ses valeurs,
toujours debout ».
Lors du rassemblement nocturne, auquel participait aussi l’ambassadeur
d’Israël, Bernard Cazeneuve a réaffirmé l’attachement de la République aux
Juifs de France tout comme l’ancien chef de l’Etat et président de l’UMP,
Nicolas Sarkozy.
Les deux responsables politiques ont à quelques minutes d’intervalle
conjuré les Juifs de ne pas quitter le pays pour trouver plus de sécurité
ailleurs, particulièrement en Israël. « Vous appartenez à l’Histoire de la
France, ses malheurs, son miracle: la France ne serait pas la France sans la
présence du judaïsme et des Juifs de France » a déclaré M. Sarkozy.
Comme en écho le ministre de l’Intérieur a lancé: « Partir, quitter la
France offrirait une insupportable victoire posthume aux assassins (…) si
vous partez c’est la France qui se met à genoux ».
Au-delà des victimes de Merah, a souligné la représentante du Crif,
l’hommage a concerné « toutes les victimes du terrorisme jihadiste ». Bernard
Henri-Levy est intervenu en clôture de la cérémonie sur l’antisémitisme
moderne.
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