Dimanche 29 Mai 2016, Francis Kalifat a été nommé à la tête du CRIF. Nous dirons nommé
et non élu car d’élection il n’y a point eue. De fait, Francis Kalifat, vice-Président du CRIF
était le seul candidat déclaré pour reprendre les fonctions de Roger Cukierman. Ce
changement dans la continuité, sans débat d’idées ni opposition, sans pluralité, pose une
double question. Celle de la représentation démocratique d’une part : comment peut-on
envisager qu’une institution de cette importance se dote d’un nouveau Président sans qu’il y
ait un minimum de confrontation de points de vue et de profession de foi, sans parler de
campagne. Celle de la légitimité institutionnelle d’autre part : comment un organe
représentatif des Juifs de France peut-il se targuer de porter la voix de la communauté auprès
des institutions et des pouvoirs publics alors qu’il est manifestement aux mains des mêmes
depuis des lustres ? Comment peut-il avoir son utilité alors qu’il semble s’être résigné à n’être
qu’une vitrine élégante, faite d’honneurs et de courbettes pour un petit aréopage de nantis
savourant avec délice le prestige que leur donne la fonction sans pour autant avoir à cœur de
défendre la majorité silencieuse. Vou savez, cette majorité de juifs simples et discrets, celle
qui vit à l’écart des paillettes et des strass, du copinage de bon ton et des ors de la
République ? Nous n’insisterons pas non plus sur le désintérêt et la désaffection des juifs de
France. Car s’il n’y a aucun candidat, c’est peut-être aussi parce que ceux qui auraient pu
l’être ne croient plus en l’institution…
Mais je l’ai dit, toutes ces questions sont balayées désormais. Kalifat est là, bienvenue à lui et
accordons-lui le bénéfice du doute. D’abord parce qu’il faut du courage pour reprendre le
poste et en accepter les responsabilités. S’il fut le seul candidat, lui, au moins, a prouvé par
cet engagement qu’il tenait à s’investir, à monter au front. Par ce geste et ce geste seul, il
redore le blason un peu terni qui est celui de l’institution. Institution qu’il connaît par cœur,
par ailleurs, pour en faire partie depuis plus de 20 ans et en avoir été le vice-président.
Rompu aux usages et aux obligations qu’elle implique, monsieur Kalifat s’évitera, sans aucun
doute, les remous et les heurts qui accompagnent immanquablement les premiers pas d’un
Président. Ce n’est peut-être pas plus mal, finalement, tant la tâche est immense.
Saluons également sa profession de foi. Dès son élection, Francis Kalifat a tenu à faire
connaître sa ligne de conduite et d’action. Et le moins que l’on puisse dire c’est qu’elle est
honorable, en prise avec les préoccupations de tous les juifs de France, sans exception. « Mon
mandat sera celui de la tolérance zéro vis-à- vis de toutes les formes de haine antijuive des
plus visibles aux plus sournoises comme celle portée par l’antisionisme », a-t- il déclaré,
marquant avec intransigeance son refus de tout dialogue avec l’extrême-gauche comme avec
le Front National. Simple, claire, sa profession de foi n’appelle rien d’autre que des actes, des
actions fortes qui fassent, enfin, bouger les lignes de front.
Monsieur Francis Kalifat, nous savons que la fonction que vous avez investie est une lourde
charge, que notre communauté, déçue par trop d’années de souffrances et d’inquiétude, vous
attend au tournant. Nous espérons donc vivement que votre mandat sera celui de l’action et du
consensus. Et que le bien de tous, plutôt que le prestige de certains, sera votre unique
préoccupation. Votre dynamisme, votre enthousiasme, votre esprit consensuel vous
permettront sans doute de faire de votre mission un succès. Car si vous étiez le seul candidat,
vous êtes aussi l’un des rares à être digne et à la hauteur de la fonction. Nous plaçons, puisque
nous n’avons d’autre choix, mais aussi puisque nous voulons croire à votre sincérité, nos
espoirs en vous.
Vous avez toutes les cartes en mains, pour que nous puissions vous soutenir.
Désormais, c’est à vous de jouer.
Am Israël Haï
Alain Sayada