BORDEAUX, 12 jan 2014 (AFP) – L’antisémitisme véhiculé dans la polémique
sur l’interdiction des spectacles de Dieudonné a plané sur la commémoration de
la rafle de plus de 300 juifs, le 10 janvier 1944 à Bordeaux, les intervenants
soulignant sa « résurgence », a constaté dimanche un journaliste de l’AFP.
« 70 ans après, l’actualité vient de nous rappeler que l’antisémitisme et le
négationnisme trouvent encore dans notre pays de sinistres porte-parole qui
distillent la haine, le mensonge et le mal sous couvert de spectacles
humoristes », a rappelé le préfet de la région Aquitaine qui s’exprimait au nom
de l’État français.
« La République ne pouvait davantage tolérer que ses valeurs fussent ainsi
bafouées », a ajouté Michel Delpuech, rappelant la décision du Conseil d’État
stipulant que « la police peut légalement interdire un spectacle qui contient
des propos de caractère antisémite et invite à la haine raciale ».
« Depuis de nombreuses années nous sommes conscients que nous n’en aurons
jamais fini avec l’antisémitisme, que nous savons le reconnaître quand il
apparait, mais nous gardions espoir que nous avions réussi à au moins
conserver notre fameux +vivre ensemble+. Or, nous ne pouvons que constater la
radicalisation des discours », a dit le président du Consistoire israélite de
Gironde, Erick Aouizerate.
« Nous effectuons un acte de mémoire en commémorant ce qui a été la plus
effroyable barbarie du XXe siècle et peut-être de l’histoire de l’humanité ».
Mais, « au-delà de l’acte de mémoire, nous effectuons un acte de militantisme
parce que le poison de l’antisémitisme et du racisme n’est pas extirpé des
idéologies de notre siècle ni même de l’âme humaine » et « on le voit sévir à
nouveau aujourd’hui en Europe, en France, chez nous », a estimé le maire UMP de
Bordeaux, Alain Juppé.
Cette rafle est la dernière des quatre grandes rafles menées dans la région
entre juillet 1942 et janvier 1944. Dans la nuit du 10 au 11 janvier, elle a
vu l’arrestation « brutale » par les Allemands et la police française de 335
juifs, principalement à Bordeaux et dans sa région (où vivaient avant-guerre
plus de 5.000 juifs).
Fait unique dans la France occupée, les raflés sont parqués dans la
synagogue de Bordeaux « saccagée », avant d’être déportés deux jours plus tard à
Drancy, dans la banlieue parisienne, puis vers les camps d’extermination nazis.
Au total, environ 1.600 juifs ont été déportés depuis Bordeaux, dont un
nombre infime a survécu.
lab/jmg