Poursuivi pour apologie d’actes de terrorisme
et provocation à la haine envers les Juifs, le polémiste Dieudonné attend
cette semaine deux jugements du tribunal correctionnel de Paris.
Dans chacun de ces dossiers, le parquet a requis 30.000 euros d’amende,
susceptibles de se transformer en emprisonnement si ce montant n’était pas
intégralement versé.
Dans le passé, Dieudonné M’Bala M’Bala, 49 ans, avait
tardé à s’acquitter de plusieurs amendes.
Mercredi, la 16e chambre du tribunal correctionnel dira si en postant sur
sa page Facebook « Je me sens Charlie Coulibaly », en référence à l’un des
auteurs des attentats de Paris, l’humoriste controversé s’est ou non rendu
coupable d’apologie d’actes de terrorisme.
Dans ce message posté le 11 janvier, alors que des millions de personnes
venaient de défiler en France contre les attentats, Dieudonné qualifiait cette
marche d' »instant magique égal au big bang qui créa l’univers ».
Il ajoutait, dans ce message rapidement retiré: « Sachez que ce soir, en ce
qui me concerne, je me sens Charlie Coulibaly », associant le slogan de soutien
au journal satirique Charlie Hebdo, « Je suis Charlie », au nom d’Amédy
Coulibaly, qui a tué quatre Juifs dans un supermarché casher et une policière
municipale.
Assurant condamner « sans aucune retenue et sans aucune ambiguïté » les
attentats, Dieudonné a affirmé devant le tribunal qu’il avait souhaité
participer à la marche à Paris, mais que sans retour du ministère de
l’Intérieur qu’il avait sollicité, il s’en était senti « exclu » et traité comme
un « terroriste ».
Ce message était une « parole de paix », a-t-il assuré.
– ‘Borderline’ –
Si l’on veut « adresser un message de paix », « il vaut mieux qu’il soit
clair », lui avait lancé, sceptique, la procureur Annabelle Philippela,
soulignant que des trois auteurs des attaques, Dieudonné avait choisi celui
qui avait délibérément visé des Juifs. Lui avait affirmé avoir fait ce choix
car Amédy Coulibaly est celui qui « met une balle dans le dos » de Clarissa
Jean-Philippe, policière municipale antillaise, qui « ressemble trait pour
trait » à sa propre fille.
Face à un Dieudonné qui s’est défendu d’avoir voulu choquer les familles
des victimes, la magistrate a étrillé le polémiste, condamné à plusieurs
reprises pour des déclarations antisémites, qui tient des propos « toujours
volontairement provocateurs, toujours faussement ambigus ». « Il pèse chacun de
ses mots, il sait justement qu’il va être borderline », « il sait qu’il va faire
un tollé, créer le buzz, il sait pertinemment comment il va être reçu ».
Jeudi, la 17e chambre du tribunal correctionnel se prononcera ensuite sur
des propos extraits de son spectacle interdit en janvier 2014 « Le Mur », visant
un journaliste de France Inter: « Tu vois, lui, si le vent tourne, je ne suis
pas sûr qu’il ait le temps de faire sa valise. Quand je l’entends parler,
Patrick Cohen, je me dis, tu vois, les chambres à gaz… Dommage. »
Dieudonné avait expliqué ses propos par un « contexte général » de polémique
l’opposant au journaliste (qui n’est pas partie civile), qui l’avait rangé
dans la catégorie « des cerveaux malades » pour justifier son refus de
l’inviter, insulte raciste, selon lui. La réponse « se situait sur mon terrain,
l’humour », avait-il assuré.
D’autres propos issus de ce même spectacle sont poursuivis, notamment: « Je
n’ai pas à prendre parti entre les Juifs et les nazis. Je n’étais pas né, je
ne sais pas qui a provoqué qui, qui a volé qui… Mais j’ai ma petite idée ».
Dans une autre procédure, au civil, qui a abouti à l’interdiction de la
vente du DVD du « Mur », dont Dieudonné a fait appel, ces propos ont été
qualifiés de contestation de crimes contre l’Humanité. Ceux visant Patrick
Cohen d’apologie de crimes contre l’Humanité.
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