ISRAËL Actualités – Journal israélien en langue française
Rubrique « Torath Israël » – Par le Rav Shélomo ZINI
Vaéra : La Foi des Patriarches, et nous…
Lors des précédentes parachiyoth (sections de la Thora), il avait déjà été mentionné et annoncé que le Peuple des enfants d’Israël s’apprêtait à sortir d’Egypte, sous la conduite de Moché Rabbénou (notre maître Moïse) qui a été envoyé par H’M’ à cette fin. Or ici, au commencement de la Parachath Vaéra, l’Eternel mentionne de façon soudaine, les Patriarches : « Je suis apparu à Abraham, à Yits’haq et à Ya’acov » (Chémoth 6, 3). On peut se demander en quoi les Patriarches, antérieurs à Moché Rabbénou, sont-ils liés au présent récit ?
Moché Rabbénou dit au Maitre du monde : « Et depuis que je suis venu vers Pharaon pour parler en Ton Nom, il a fait du mal à ce Peuple, et sauver, Tu n’as pas sauvé Ton Peuple ! » (Chémoth (5, 23). Etonnement, Moïse cet homme qualifié dans la Thora par D’ Lui-même comme étant à la fois l’homme le plus « humble de la Terre » et le plus « fidèle de Ma maison », semble reprocher au Maître du Monde « Tu m’as envoyé en mission, cela n’a pas servi Tes attentes puisqu’au contraire, il n’en est rien sorti de bon si ce n’est l’aggravation de la situation !… ». A cela, Hakadoch Baroukh Hou (le Saint Béni-soit-Il) lui répond, comme l’explique longuement Rachi : « Je suis apparu à Abraham, à Yits’haq et à Ya’acov en tant que ‘El Chaddaï’… » (Chémoth 6, 3), « J’ai promis aux Patriarches Abraham, à Yits’haq et à Ya’acov la Terre d’Israël, en rappelant chaque fois « Je suis ‘El Chaddaï’ (le D’ Tout Puissant) », c’est-à-dire Je leur ai fait des Promesses sur la base (garantie) de Mon Nom, mais je n’avais pas encore réalisé Mes promesses. Comme pour nous enseigner que le niveau des Patriarches était tel qu’ils ont compris « du premier coup » que lorsqu’H’M’ promet, Il accorde déjà en récompense de début d’acceptation de la Promesse comme il sied, le maintien et la consolidation de la dimension divine inhérente à chacun, car le plus grand bonheur d’un Homme (fait à l’image de D’), c’est sa conscience d’être habité par le divin – la divinité du D’ Unique – et ce, avant même que l’Eternel accomplisse Sa promesse, avant même de recevoir la moindre récompense !… « … Mais mon nom H’M’, Je ne me suis pas fait connaître à eux : Je n’ai pas été connu d’eux dans Mon attribut de vérité, qui fait que Je m’appelle H’M’ (le Tétragramme), digne de confiance pour tenir parole, car Je leur ai fait des promesses, mais Je ne les ai pas encore réalisées » (Rachi sur Chémoth 6, 3). Ainsi, le dialogue entre H’M’ et Moché peut se résumer de la sorte : Eux, les Patriarches n’ont posé aucune question, ils n’ont osé aucune remise en cause liée à de l’impatience révélatrice possible d’un manque d’Emouna, ils ne se sont plaints de rien, et toi Moché, tu oses « exercer sur Moi la pression » ?!?…
Ce dialogue révèle en vérité un sens très profond quant au message que l’Eternel veut adresser à Moché Rabbénou, et à travers lui, faire passer ce même message aux générations futures, c’est-à-dire, à nous-mêmes.
Toi Moché, auquel Je fais confier le soin de libérer le Peuple d’Israël de l’esclavage d’Egypte, de le conduire dans le désert, puis recueillir la Thora que tu vas leur enseigner afin de l’accomplir en Erets Israël, cette Terre si désirable qui reste l’objectif essentiel de Mes promesses, si tu veux réussir l’exploit d’une telle mission, tu te dois d’abord de commencer par apprendre des Patriarches ce que signifie la « Emouna » (Foi d’Israël), savoir qu’il faut se ceindre de patience car les réalisations nécessitent toujours du temps, et que la capacité à attendre est précisément ce qui définit la Emouna, même si cela constitue également une épreuve inéluctable.
La réponse d’H’M’ en ce sens, ne se fait pas attendre : « Quelle perte, ceux que l’on a perdu et que nul ne peut remplacer !…». Contrairement au dicton populaire bien français selon lequel « nul n’est irremplaçable… », ce dicton n’est effectivement vrai que pour des êtres idéologiquement corrompus par un esprit individualiste exacerbé, mais quand il s’agit au contraire d’êtres exceptionnels à l’esprit altruiste et responsable, qui substitue à leur égo la seule volonté divine, ses décisions et décrets, alors oui, il est des êtres absolument uniques, irremplaçables qui vivent pleinement leur vie terrestre et ne meurent jamais, car leurs enseignements et leur exemplarité demeurent en nous, tels des luminaires éternels qui puisent leur énergie directement du Dieu d’Israël. Or, s’ils ne meurent jamais, c’est aussi parce que plus personne ne peut se hisser à un tel niveau !…
Néanmoins, H’M’ a décidé qu’ils ne meurent jamais afin que nous apprenions d’eux, chose qui nous gratifie des mérite, de bénédictions et d’héritages sacrés que nous devons à l’exemplarité de leur Emouna.
Ainsi, la Emouna de ces « Yé’hidé Ségoula », ces êtres exceptionnels qu’étaient nos Patriarches et Matriarches d’Israël, toi Moché tu te devras désormais de l’enseigner à toute la Nation d’Israël afin que la Torah d’Israël ne soit pas amputée comme ta Emouna d’exil d’avant la sortie d’Egypte !…
« … Maintenant Tu verras ce que Je ferai à Pharaon, car d’une main forte Il les renverra, et d’une main forte, il les chassera de son pays. » (Chémoth 6, 1). « Tu as critiqué Mes manières d’agir ! Tu n’es pas comme Abraham à qui j’avais commencé par dire « Car c’est par Yits’haq que sera appelée pour toi une descendance » (Béréchith 21,12), pour lui dire ensuite : « Fais-le monter là en holocauste » (Béréchith 22,2), et qui n’a émis aucune critique » (Rachi sur Chémoth 6, 1). C’est pourquoi il est dit « maintenant tu verras » : « Tu verras ce qui va arriver (maintenant) à Pharaon, (mais tu ne verras pas) ce qui va arriver aux Rois des sept Nations lorsque Je conduirai Israël sur sa Terre » (Sanhedrin 111,a).
Celui qui perçoit d’un regard profond l’enseignement divin donné à Moché Rabbénou et explicité ici par la Guémara, peut ainsi mieux comprendre pourquoi certains Grands d’Israël, authentiquement grands, ont pu se tromper quant au sens de l’Histoire voulu par D’ que ce soit à l’époque des explorateurs lors de la traversée du désert, ou plus récemment lors du retour du Peuple d’Israël sur notre Terre, cette Terre de désir, aimée et choisie par le D’ d’Israël, tout comme ce même D’ « nous a choisi parmi toutes les Nations et nous a donné Sa Thora ».
Plus un serviteur de D’ est grand, plus la « punition » infligée par D’ est grande, et correspond exactement à la nature de la transgression (de même en est-il pour les récompenses évidemment), et ce, en vertu du principe de « Midda kénégued Midda », « Mesure pour mesure ».
Ainsi, avant chaque sortie d’exil, si les Grands d’Israël émettent des critiques à l’encontre d’H’M’ en raison de ce que, par manque de patience et donc d’Emouna, ils interprètent les chemins d’H’M’ et Ses desseins de manière erronée, ils sont jugés sévèrement par H’M’, à l’image de ce que Moché Rabbénou a été durement repris.
De même, avant chaque entrée en Terre d’Israël, H’M’ applique à ces Grands le principe de « Midda kénegued Midda ». C’est pourquoi Moché Rabbénou, le plus grand des Maîtres de Thora de tous les temps, lorsqu’il aura compris la valeur de la Terre d’Israël aux yeux d’H’M’, il le suppliera par d’innombrables prières d’entrer en Erets Israël pour accomplir les Mitsvoth de la Thora, et malgré tout, H’M’ ne l’y autorisera pas, il verra la Terre, mais n’aura pas le mérite d’y vivre, et ce pour avoir jugé D’ dans sa manière d’organiser la sortie d’Egypte.
Evidemment, s’agissant de Moché Rabbénou, on ne peut à notre très humble niveau, qu’en tirer un raisonnement a fortiori : si déjà le Grand Tsadik Moché Rabbénou, dont les mérites nous dépassent à l’évidence de plusieurs univers, a été jugé aussi sévèrement afin que les enfants d’Israël comprennent que « les chemins et les pensées de D’ » ne peuvent être déduits de « nos chemins et pensées » comme nous le rappelle le prophète Isaïe, à plus forte raison, les Sages et les dirigeants du Peuple d’Israël de chaque génération, doivent-ils tirer une leçon d’Emouna de nos Patriarches, et réapprendre à accepter les voies divines de l’Histoire voulue par H’M’, que l’on comprenne ces voies ou non.
Comment dès lors, « réparer la faute de manque d’Emouna » de Moché Rabbénou, faute qui sera bien plus grave encore chez les explorateurs qui – contrairement à Moché Rabbénou – ont en plus, ajouté une faute infiniment plus grave encore et semble-t-il impardonnable, celle de médire sur la Terre d’Israël ? La réponse à cette question est la même qu’il convient de donner à tous ceux qui n’ont cessé d’exercer une propagande pernicieuse envers Erets Israël dans notre génération ! Ainsi que l’enseigne de façon magistrale Rabbi Yissakhar Shlomo TEICHTAL Zatsa »L dans son célèbre ouvrage « Em Habanim Sémé’ha » : « … Ainsi de nos jours, les dirigeants communautaires se doivent de réparer la propagande fallacieuse des anciens, par un militantisme en faveur d’Erets Israël afin de solder leur lourd contentieux envers H’M’… et doivent réveiller en eux un feu et une étincelle d’amour pour notre beau Pays ».
Il semblerait qu’à part certains irréductibles négationnistes ou néga-sionistes, baroukh H’M’, de plus en plus de juifs font Téchouva vers D’, grâce aux deux promesses d’héritage faites au Peuple d’Israël : la Torah et la Terre d’Israël.
C’est à ce double retour auquel tous les Grands d’Israël ont toujours fini par admettre le caractère indissociable pour exprimer totalement sa foi en le D’ d’Israël, qu’ils nous invite à projeter notre avenir – chacun en son temps – dans la Terre de nos Aïeux et celle de nos enfants, Terre qui porte le même nom que son Peuple et son D’ : Israël.