BERLIN (Allemagne), 31 juil 2013 (AFP) – Le patriarche de ThyssenKrupp,
Berthold Beitz, décoré comme « Juste » par Israël pour avoir sauvé des Juifs de
la déportation, est mort dans sa centième année, a annoncé mercredi le géant
de l’acier allemand.
« Le président d’honneur du conseil de surveillance de ThyssenKrupp est mort
mardi à l’âge de 99 ans », a indiqué l’entreprise dans un communiqué.
« Pendant la Seconde guerre mondiale il a, avec son épouse, manifesté un
courage impressionnant et sauvé des centaines de juifs des SS », rappelle le
groupe.
« L’Allemagne perd l’un de ses entrepreneurs les plus prestigieux qui ont
marqué le pays », a déclaré la chancelière allemande Angela Merkel dans un
communiqué.
Né le 26 septembre 1913, M. Beitz était responsable entre 1941 et 1944 de
champs pétroliers dans la ville de Boryslav, non loin de Lvov, occupée alors
par les Allemands et actuellement en Ukraine.
Dans cette ville, où vivait une importante communauté juive, victime
pendant l’occupation nazie d’exécutions sommaires en pleine rue ou de
déportations, M. Beitz s’engagea à plusieurs reprises pour sauver ses employés
des camps.
« Du matin au soir nous voyions tout près de nous ce qui arrivait aux Juifs
de Boryslav. Quand vous voyez qu’une femme avec un enfant dans les bras est
tuée, et que vous avez vous-même un enfant, alors vous réagissez », dira plus
tard M. Beitz, qui ne fut pas un opposant politique des nazis, selon le site
du mémorial de Yad Vashem.
En 1973, Israël le décora du titre de « Juste parmi les nations » qui ont mis
leur vie en danger pour sauver des Juifs.
« L’un des plus grands Allemands du siècle passé » est mort, a réagi mercredi
dans un communiqué le Congrès juif mondial (WJC), qui lui promet « l’amour et
la gratitude éternels du peuple juif ».
Après la capitulation du nazisme, M. Beitz fut nommé en 1953 mandataire
général des aciéries Krupp, symbole par excellence du producteur de canons
allemands pendant les deux guerres mondiales. Il y était resté en activité
jusqu’en 1989, avant de devenir président d’honneur du conseil de surveillance
de Krupp puis de ThyssenKrupp, poste qu’il a occupé jusqu’à sa mort.
En mettant à sa tête un Juste comme « Schindler », l’entreprise d’Essen
d’Alfried Krupp tentait de se redonner une image respectable après avoir
pactisé avec les criminels du IIIe Reich.
Après la mort d’Alfried Krupp en 1967, M. Beitz transforma l’entreprise en
société par actions, le fils ayant renoncé à son héritage.
Krupp a fusionné en 1999 avec Thyssen, autre grand aciériste de la Ruhr et
également fournisseur d’armes aux nazis.
Le patron de la Fédération allemande de l’Industrie (BDI), Ulrich Grillo, a
rendu hommage à M. Beitz comme « l’une des plus grandes personnalités de
l’histoire industrielle à succès de l’Allemagne après la Seconde Guerre
mondiale ».
Et le président du syndicat allemand des métallos, IG Metall, Berthold
Huber, a rendu hommage à la « personnalité exceptionnelle » de M. Beitz,
soulignant son « sens de la responsabilité, son courage et sa détermination ».