Paris, 29 juin 2015 (AFP) – Les enquêteurs poursuivent lundi
l’interrogatoire de Yassin Salhi, qui a avoué avoir tué l’homme dont la tête
décapitée a été utilisée pour signer l’attentat en Isère, après la découverte
d’une connexion syrienne dans ce dossier.
Salhi a été transféré dimanche en fin de journée vers le siège de la
sous-direction antiterroriste de la police judiciaire (SDAT) à
Levallois-Perret (Hauts-de-Seine).
Il a avoué avoir assassiné vendredi Hervé Cornara, 54 ans, qui était aussi
son patron. Et les enquêteurs ont découvert dans son téléphone portable un
macabre selfie, pris avec la tête de sa victime, envoyé à un correspondant via
une application de messagerie instantanée.
Le numéro de téléphone du destinataire est canadien, mais les enquêteurs
étaient convaincus qu’il se trouvait en fait dans les zones de jihad
irako-syriennes. Ils pensent désormais avoir identifié un jihadiste français
présent dans les zones de combats et répertorié parmi les 473 jihadistes
français actuellement sur place.
Originaire de Vesoul, cet homme, prénommé Sébastien-Younès, est parti en
novembre 2014 en Syrie, rejoignant le secteur de Raqa, où il combattrait dans
les rangs de l’organisation État islamique (EI), selon des sources proches du
dossier.
Aucune source n’a cependant fait état d’éléments montrant que Yassin Salhi
se serait lui-même rendu en Syrie, bien qu’il ait été repéré depuis le milieu
des années 2000 par les services de renseignement comme s’étant radicalisé
dans sa ville natale de Pontarlier (Doubs).
Il est brièvement apparu dimanche, avant son transfert vers la région
parisienne, lorsqu’il a été conduit sous très forte escorte à son domicile de
Saint-Priest, près de Lyon, notamment pour récupérer son passeport, selon une
source proche du dossier. Entouré de policiers cagoulés et armés, il était
revêtu d’un gilet pare-balles, la tête couverte d’un tissu blanc.
– Mise en scène macabre –
La tête d’Hervé Cornara avait été retrouvée accrochée à un grillage
d’enceinte d’une usine de Saint-Quentin-Fallavier (Isère), entourée de
drapeaux où était écrite la profession de foi islamique, rappelant les mises
en scène macabres de l’EI. Des fleurs ont été déposées depuis à cet endroit.
L’épouse d’Hervé Cornara avait vu son mari pour la dernière fois peu après
07H30 vendredi, dans leur société de transport de Chassieu (Rhône). L’attentat
a eu lieu deux heures plus tard. Après une explosion dans l’usine de
Saint-Quentin, Yassin Salhi a été rapidement interpellé.
Le suspect a expliqué aux enquêteurs avoir tué son patron sur un parking en
se rendant sur les lieux de l’attentat.
Deux jours plus tôt, Salhi avait eu un différend d’ordre professionnel avec
sa victime. Le ton était monté entre les deux hommes, quand l’employé avait
fait tomber une palette de matériel informatique.
Quelque 200 personnes, en majorité des musulmans, se sont rassemblées
dimanche en fin d’après-midi devant la mosquée de Villefontaine (Isère) pour
« condamner l’attentat diabolique » de Saint-Quentin-Fallavier, à quelques
kilomètre de là.
« Ces gens-là ce sont des terroristes qui ont trahi le message essentiel de
l’islam », a lancé Azzedine Gaci, recteur de la mosquée de Villeurbanne
(Rhône). « Ne les laissons pas nous diviser. »
« C’est d’abord notre communauté musulmane qui en pâtit!, a dit le recteur
de la mosquée locale, Ahmed Hamlaoui, en appelant à « combattre les amalgames ».
Pour lui, « il n’y a pas de confits entre les religions, ni entre les
civilisations ».
Plus tôt dimanche le Premier ministre Manuel Valls avait parlé de « guerre
de civilisation » à propos du « terrorisme » jihadiste, mettant en garde contre
une « menace terroriste majeure », près de six mois après les attaques
jihadistes sanglantes de janvier contre Charlie Hebdo, des policiers et un
supermarché casher.
Fiché de 2006 à 2008 par les services de renseignement pour radicalisation,
Yassin Salhi, originaire du Doubs et fraîchement arrivé à Saint-Priest, dans
la métropole lyonnaise, avait de nouveau été repéré entre 2011 et 2014 pour
ses liens avec la mouvance salafiste lyonnaise.
Il s’était radicalisé à Pontarlier au début des années 2000 au contact d’un
homme soupçonné d’avoir préparé des attentats en Indonésie avec des militants
d’Al-Qaïda.
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