L’éventuelle interdiction des spectacles de
l’humoriste Dieudonné, jugés antisémites, suscite mardi des réactions mitigées
chez les éditorialites de la presse quotidienne qui la jugent moralement juste
mais incertaine sur le plan juridique, voire comme une « dangeureuse caisse de
résonance ».
Eric Decouty, dans Libération, estime que « Si Dieudonné use de la loi
protectrice de 1881 sur la +liberté de réunion+, les textes sur l’incitation à
la haine, sur l’injure ou la diffamation envers les Juifs doivent être
appliqués sans relâche (et) le gouvernement doit (…) veiller à ce que les
décisions de justice soient exercées immédiatement. Car si Dieudonné doit
pouvoir continuer à faire le clown antisémite, il doit payer pour chacun de
ses délits. »
Dans les quotidiens régionaux, Yann Marec (Le Midi Libre) approuve lka
position du ministre de l’interieur manuel Valls dont « le combat est osé mais
louable (…)Il serait grave et dangereux qu’au prétexte que certains
exploitent les failles d’une démocratie trop bienveillante, nous ne soyons pas
davantage vigilants ».
La Nouvelle République du Centre ouest, avec Hervé Cannet, approuve aussi
car « la croisade contre Dieudonné, dans ce qu’elle révèle du côté obscur de la
France, teste aussi l’ensemble de la société sur sa capacité à réagir face à
ce que Christiane Taubira désigne comme une +barbarie ricanante+. »
Mais, pour L’Est Républicain, Philippe Marcacci met en garde: « l’avocat du
« sinistre personnage » (dixit Manuel Valls) a prévenu: sûr de son droit (il a
déjà gagné à plusieurs reprises), son client contestera en justice tout veto ».
D’autant, ajoute-t-il, que « le battage actuel joue comme une dangereuse caisse
de résonance ».
La Charente Libre, sous la plume de Jean-Louis Hervois, met aussi un bémol:
« rien ne dit que les directives ministérielles réussiront là où les
initiatives des maires ont échoué face au principe absolu de liberté
d’expression ». Mais il ajoute toutefois que « parce qu’elle est vulnérable, il
arrive que la démocratie se grandisse en bousculant ainsi le droit aux
entournures ».
Pour Sud-ouest, Bruno Dive souligne que « le problème avec les gens comme
Dieudonné, c’est qu’il n’y a le choix qu’entre de mauvaises solutions pour
contrer leurs provocations et leurs délires ». M. Valls, « a joué pendant deux
semaines les impresarios de luxe pour un personnage dont le discours et
l’attitude s’avèrent chaque jour un peu plus détestables. »
« Dieudonné n’attend qu’une chose : afficher une nouvelle fois la fameuse
+quenelle+, comme un pied de nez au ministre et se poser, évidemment, en
victime », résume Christophe Bonnefoy dans Le Journal de la Haute-Marne, car,
selon lui, « le respect de l’ordre public qu’avance Manuel Valls s’opposera
forcément aux notions de liberté d’expression, de liberté de réunion, voire de
création artistique ».