Les faits autour du Kever David remontent à plusieurs siècles et opposent les Juifs au Vatican. Celui-ci revendique la souveraineté du lieu prétendant que c’est à cet endroit qu’aurait eu lieu la fameuse »cène », ou dernier repas entre J.C. et ses apôtres.
LPH a enquêté sur ce différend et sur cette question qui devient de plus en plus préoccupante : le Kever David est-il menacé ?
Où le Roi David a-t-il été enterré ?
Attardons-nous d’abord sur le premier des arguments opposés aux Juifs : David ne serait pas enterré ici, puisque dans la Bible, il est dit que sa tombe se trouve dans »Ir David » (Mela’him 1, 2:10). Or l’emplacement tel que nous le connaissons aujourd’hui n’est pas dans ce que l’on appelle »Ir David » mais sur le Mont Sion.
La majorité des historiens et des archéologues sont formels : aucune question ne se pose, le Tombeau de David se trouve sur le Mont Sion. La confusion vient du fait que ce que l’on connaît comme »Ir David » aujourd’hui n’était en fait pas appelé ainsi à l’époque de David. C’était Yeroushalayim. Ir David était un petit terrain de 200 dounam qui se situait en hauteur puisque l’on parle dans de nombreux textes de la »forteresse de David » (Metsoudat David), donc sur un mont.
Néanmoins, cette thèse continue à être contestée, y compris par certains Israéliens. Pourquoi ?
Michel David, activiste pour la défense du Kever David, nous explique : « Tout ce qui touche au Kever David est biaisé par la volonté du gouvernement israélien de conserver de bonnes relations avec le Vatican et le monde chrétien. Ainsi pour ne pas les froisser, jusqu’à aujourd’hui il est interdit d’effectuer des fouilles archéologiques dans le sous-sol du Kever et d’asseoir la thèse selon laquelle David Hamele’h est bien enterré ici ».
La naissance du conflit de souveraineté
Ce n’est qu’au 12e siècle que les Chrétiens ont commencé à affirmer que la »cène » avait eu lieu dans la salle qui se situe au-dessus du Tombeau de David. Se basant sur des textes qui décrivent l’événement dans cette zone, les Chrétiens ont décidé de s’approprier le lieu, s’appuyant également sur le fait que selon leur tradition, J.C. est un descendant du Roi David.
Depuis plusieurs siècles donc, les Chrétiens contestent ce lieu aux Juifs. Des documents historiques montrent leur acharnement à prouver que les Juifs n’ont aucun lien avec l’endroit, quitte à falsifier certains éléments indiscutables !
Michel David nous rappelle que le Tombeau de David a toujours été un lieu de prières pour les Juifs : « Même pendant la période ottomane, les Musulmans laissaient les Juifs prier là-bas ! ».
Par ailleurs, il est important de souligner que le Mont Sion où se trouve le Kever David a toujours été entre les mains d’Israël depuis 1948, autrement dit, il ne s’agit pas d’un lieu ayant été conquis en 1967.
Le Kever David passera-t-il aux mains du Vatican ?
Peu importe les liens qui nous unissent au lieu, le Vatican négocie maintenant depuis plusieurs années la souveraineté sur le bâtiment dans lequel se trouve le Kever du Roi David. Et le gouvernement ne lui oppose pas de fin de non-recevoir. Pour le moment, les Chrétiens ont pris possession du deuxième étage, là où se serait tenue la »cène », et l’accès y est interdit aux Juifs. Ils ont également obtenu l’autorisation d’entrer une fois par an au Kever David, avec toutefois l’interdiction d’y célébrer une messe.
Pour autant, les engagements des Chrétiens ne sont pas toujours respectés. Ainsi, par exemple, cette année, la Pentecôte chrétienne tombait le même jour que Chavouot. Alors que les Juifs priaient sur la Tombe du Roi David, dont nous célébrons la hiloula ce même jour, les Chrétiens en haut, célébraient une messe, faisaient brûler des encens. Quelques jours plus tard, ils ont voulu pénétrer dans le Kever, comme ils en sont autorisés une fois par an, mais avec l’intention d’y faire leur culte. Les Juifs ont décidé de les en empêcher : il n’était pas question de laisser l »’avoda zara » s’étaler davantage. Des émeutes s’en sont suivies montrant la sensibilité extrême du sujet.
Michel David et tous les activistes pour la défense du Tombeau de David lancent un cri d’alarme : « Jusqu’en 1967, on comptait environ 90 événements religieux juifs par an au Kever David. Les Juifs y venaient par milliers. Avec la libération du Kotel, le lieu a peu à peu été abandonné… Les Chrétiens, eux, ne lâchent pas : ils sont entre 1500 et 2000 à s’y rendre chaque jour ! Les Juifs doivent prendre conscience de l’importance de venir sur ce lieu saint ! Pour les Chrétiens, il est très important de conquérir Jérusalem et c’est une de leur façon d’y parvenir ! ».
Qu’en est-il alors des tractations avec le Vatican ? Pour Michel David, le gouvernement israélien agit avec trop de retenue face aux revendications chrétiennes. Bien que les politiques en charge du dossier affirment qu’il n’est pas question de laisser le Kever David au Vatican, l’inquiétude monte. « Nous agissons beaucoup au cœur de la Knesset pour informer les députés, les emmener sur place, leur faire comprendre les enjeux réels pour notre identité juive », nous informe Michel David.
Dans le précédent gouvernement, des députés comme Moshé Feiglin, Yoni Chetboun, Nissim Zeev ou Miri Regev ont marqué leur attachement au lieu. C’est Zeev Elkin qui était l’un des responsables du dossier : il a confirmé à maintes reprises que le Kever David resterait sous autorité israélienne. Aujourd’hui, la nouvelle coalition étant fragile, les défenseurs du Tombeau sont inquiets : « Nous devons agir face à des pouvoirs publics (gouvernement, police et même rabbinat) dont l’attitude est dictée par des considérations politiques et diplomatiques. Nous souhaitons leur faire comprendre qu’il est vital de préserver et de renforcer la présence juive au Kever David. Le nouveau ministre du tourisme, Yariv Levine, devrait venir prochainement et nous comptons poursuivre notre pression dans les couloirs de la Knesset ».
En attendant, plusieurs organismes juifs agissent activement sur place. La Rabbanite Yoheved Grossman y effectue un travail extraordinaire en organisant toutes les semaines des événements réunissant beaucoup de monde. Le Rav Yaacov Sevilia, aussi, se dévoue pour que des groupes viennent visiter les lieux et comprendre l’histoire.
Somme toute, ces personnes pensent que chaque Juif devrait comprendre et montrer que le Kever David est un lieu de la plus haute importance et que nous devons nous mobiliser pour le préserver.
