Paris, 2 avr 2015 (AFP) – La présidente du FN Marine Le Pen a été
contrainte une nouvelle fois jeudi de se désolidariser des propos de son père,
qui a répété ses déclarations sur les chambres à gaz nazies, « détail de
l’Histoire ».
« Je suis en profond désaccord sur le fond et sur la forme », a-t-elle
indiqué à l’AFP. Dans la matinée, Jean-Marie Le Pen avait réitéré sur BFMTV
ses affirmations sur les chambres à gaz, qualifiées de « point de détail de la
guerre ».
Prononcés une première fois en 1987 et très largement condamnés, ces propos
ont été volontiers répétés par Jean-Marie Le Pen: en 1997, à Munich
(Allemagne), en 2008, au magazine Bretons, en 2009 au Parlement européen, etc.
Il a été condamné plusieurs fois.
Mme Le Pen s’est démarquée à plusieurs reprises: en 2011, elle avait dit
que les camps nazis étaient « le summum de la barbarie ».
En juin dernier, elle avait aussi dénoncé une « faute politique » de
Jean-Marie Le Pen quand celui-ci avait parlé d’une « fournée » concernant
Patrick Bruel, qui est juif. Elle avait vu dans « l’antisémitisme », largement
dénoncé, de la « malveillance », mais estimé que son père aurait dû « anticiper
l’interprétation qui serait faite » du mot « fournée ».
En revanche, la patronne du FN s’était abstenue de critiquer, en période
électorale, la citation par son père de l’écrivain collaborationniste et
antisémite Robert Brasillach en 2012, ou juste avant les élections européennes
de 2014 la déclaration paternelle sur « Monseigneur Ebola » qui peut régler
« l’explosion démographique ».
Opposition constante père-fille : pour le « punk » Jean-Marie Le Pen, comme
l’a qualifié sa fille dans un entretien au magazine Causeur, les polémiques,
voulues ou pas, font progresser le FN. Elles « l’arrachent lui au néant
médiatique, pas le Front », rétorque Mme Le Pen, en « désaccord majeur » avec lui
à ce sujet. « Ces déclarations n’entachent pas le crédit du FN mais le sien »,
lâche-t-elle.
– ‘Il ne changera pas’ –
Reste que Jean-Marie Le Pen n’est pas que président d’honneur du FN, à ce
titre membre de droit de toutes les instances du parti d’extrême droite : il
est aussi candidat autoproclamé du parti pour les régionales de décembre en
Provence-Alpes-Côte d’Azur, l’une des principales cibles du FN.
« Il veut savonner la planche de sa fille. En l’occurrence, il a savonné la
sienne en Paca ! C’est délibéré: il n’a jamais voulu gagner une seule élection
de sa vie! » analyse un « mariniste ».
Ces derniers temps, quelques responsables frontistes ont émis l’idée que
Jean-Marie Le Pen s’interrogerait sur l’opportunité d' »y aller » ou pas. Marine
Le Pen peut-elle lui retirer sa candidature, qui n’est pas encore officialisée
par les instances du parti ? « Ça sera à elle de décider. Il faut mettre
Jean-Marie Le Pen face à ses responsabilités: il ne veut pas le pouvoir, qu’il
le dise. »
« Je ne peux pas prendre position aujourd’hui devant vous. Ce n’est pas à
moi de répondre », abonde Wallerand de Saint-Just, trésorier du FN et comme
tous les frontistes très prudent sur les relations entre « Le Pen » et « Marine ».
« Le FN de Marine Le Pen a déjà suffisamment démontré qu’il n’était pas du
tout sur la même longueur d’ondes que Jean-Marie Le Pen à ce sujet-là. Les
gens sont toujours sensibles à ce qui s’est passé pendant la Seconde Guerre
mondiale, à la spécificité des camps. Mais ce que dit Jean-Marie Le Pen, tout
le monde s’en fiche, je pense », veut-il croire aussi.
Pour un proche de Jean-Marie Le Pen, celui-ci « a la légitimité pour être
candidat. » Et ses déclarations ? « Il ne changera pas. Alors il faut faire
avec. »
Reste que les opposants au FN se sont immédiatement saisis de l’affaire.
D’abord les associatifs : le Crif par un communiqué, SOS Racisme par des
tweets affirmant que l’association « refera condamner » le patriarche frontiste
pour ces propos, l’Union des étudiants juifs de France en annonçant une
plainte. Les politiques aussi : les Jeunes socialistes, les UMP Renaud
Muselier et Eric Ciotti – potentiels rivaux de M. Le Pen en Paca – ont dénoncé
ces propos dans des tweets.
Un ponte de l’UMP dans la région se réjouissait il y a quelque temps: « Sa
candidature, c’est un atout pour nous » par rapport à Marion Maréchal-Le Pen,
sa petite-fille qui briguait aussi le poste.
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