Comme annoncé à l’automne, Paris Habitat, plus gros bailleurs de la Ville de Paris, s’est doté d’une brigade d’une centaine d’agents assermentés pour sanctionner les incivilités.
Ils ne sont plus de simples (anges ?) gardiens. Ils ont désormais le pouvoir de verbaliser les locataires indélicats. Paris Habitat, le plus gros bailleur de la Ville de Paris (120 000 logements), vient de se doter d’une brigade d’une centaine de gardiens mais aussi de gérants d’agence et de conseillers de sûreté chargés de lutter contre les incivilités du quotidien dans les cités HLM.
Une cinquantaine d’agents formés à l’automne ont prêté serment ce mardi matin dans le nouveau palais de justice des Batignolles (XVIIe). Cinquante autres volontaires passeront devant le juge ce vendredi.
Grille d’entrée cassée, boîtes aux lettres vandalisées, jets de mégots, déjections canines dans les parties communes, jets d’urine dans les ascenseurs, encombrants abandonnés dans le local à poubelle, nuisances sonores… Après avoir constaté une infraction, ces « gardes assermentés » pourront dresser des procès-verbaux qu’ils transmettront à la police ou au procureur de la République selon les catégories des infractions. Les locataires pris en flagrant délit pourront écoper d’amendes allant de 38 € à 3 750€ pour les délits les plus graves.
« Lorsque les tentatives de médiation ont échoué, il reste la peur du gendarme », explique Lala Mireau, gardienne depuis plus de dix ans dans la résidence Chaufourniers (XIXe) qui affirme ne pas craindre les « représailles » car son nouveau statut la protège. Dans cette cité de 50 logements, la vie n’est pas un long fleuve tranquille. Poubelles abandonnées au pied des conteneurs, déjections canines, graffitis sont le lot quotidien. « Face à des locataires récalcitrants, nous disposons désormais d’une arme dissuasive. Mais il n’est pas question de se substituer à la police et de dresser des procès-verbaux à tout-va. Je continuerai à privilégier le dialogue », promet l’agent de Paris Habitat.
Son homologue de la résidence du 247, rue Marcadet (XVIIIe) tire le même constat. « Je suis confronté à des incivilités quotidiennes. L’expérience montre que la répression porte ses fruits quand les tentatives de médiation ont échoué. Ce nouveau dispositif va nous aider à régler les problèmes récurrents », croit Khalid El Ouazzani.
Les locataires du 247, rue Marcadet sont divisés : « Il faut privilégier le dialogue et les campagnes de sensibilisation plutôt que de sanctionner au risque de faire dégénérer le climat. Ce n’est pas le rôle d’un gardien de faire la police », réagit une locataire. « Notre résidence est très sale et les jeunes squattent nos halls d’immeuble, laissant derrière eux canettes, mégots et relief de kebab. Mais ont réglé rien dans le conflit. Il vaudrait mieux faire un effort sur la propreté et engager les travaux de réhabilitation plutôt que de faire de la répression », renchérit une jeune femme. Tous ne sont pas de cet avis. « Depuis ces dernières années, on constate de nombreuses dérives. Ce sont les locataires qui font les frais des dégradations. Il est grand temps d’agir », assène une retraitée.
Sans attendre les résultats de cette expérimentation, les deux autres bailleurs sociaux de la ville de Paris, la RIVP et Elogie-Siemp sont en train de mettre en place le même dispositif. « Il était nécessaire de prendre des mesures pour lutter efficacement contre les incivilités qui sont à l’origine de 25 % des demandes de mutation », martèle Ian Brossat, adjoint (PCF) chargé du logement à la maire de Paris en rappelant que la ville de Boulogne-sur-Mer a obtenu de « très bons résultats avec ce dispositif ». « Quand on est locataires, on a des droits mais aussi des devoirs. Et le premier de ces devoirs est de ne pas pourrir la vie de ses voisins ».