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Edito de Alain SAYADA – Le Testament d’Ilan

 

La semaine dernière au sein de la communauté juive, tout le monde ne parlait que de ça,

de ce 10ème anniversaire, commémorant l’assassinat de notre frère, notre enfant à tous :

Ilan Halimi zal. Plusieurs commémorations ont donc eu lieu, organisées par diverses

organisations, notamment à Bagneux. Bagneux, lieu tristement célèbre de son

kidnapping. Dans ce sordide appartement de cette ville populaire des Hauts-de-Seine,

Ilan fut torturé pendant 24 jours par le gang des barbares avant d’être relâché, nu,

ligotté et agonisant sur une voie ferrée. Il mourrut lors de son transport à l’hôpital. Fait

encore plus tragique, les trois quarts des tortionnaires membres de ce triste gang sont

aujourd’hui en liberté, après avoir purgé leur soit-disant peine… Ilan, lui, repose à

Jérusalem… A tout jamais.

Mais revenons à ces fameuses commémorations. Une deuxième cérémonie s’est

déroulée à Paris, Boulevard Voltaire, dans le 11ème arrondissement de Paris, organisée

par Guershon Nduwa, Président de la Fraternité Judéo-Noire. Hélas, seules quelques

centaines de personnes étaient au rendez-vous. Ironie du sort, les représentants de la

communauté juive, Consistoire de Paris, CRIF et consorts, avaient bien compris

l’importance du rendez-vous et ne l’auraient certainement pas manqué. De même pour

les médias qui sont venus en masse couvrir cette commémoration. Ils en furent pour

leurs frais… Après les attentats de Toulouse, de Bruxelles, de l’Hyper Cacher de la Porte

de Vincennes, de Copenhague, ou bien du Bataclan, la communauté juive, forte de plus

de 350 000 âmes à Paris et région parisienne, n’a pas su mobiliser plus de 300

personnes, soit moins de 0,1 % de son effectif pour cet événement !

Où étions-nous ? Où étiez-vous Juifs de France ? Comment avons-nous pu présenter aux

yeux du monde cette déffection, cette salle vide, ce manque total d’intérêt pour ce drame

fondateur : en France, il y a dix ans, alors que le 21ème siècle entrait à l’école élémentaire,

on tuait de nouveau sur le sol français, des juifs dont le seul tort était d’être juif. Et nous,

juifs de France, éprouvés par dix ans d’actes antisémites tous plus violents et

traumatisants les uns que les autres, nous sommes incapables aujourd’hui d’offrir à cette

tragédie annonciatrice de notre funeste sort, une digne reconnaissance…

Je ne jette la pierre à aucun de mes correlégionnaires. Loin de moi l’idée de distribuer de

bons ou de mauvais points. Je m’interroge simplement sur ce que nous sommes, qui

nous sommes et quel est notre avenir si nous sommes dans l’incapacité, aujourd’hui, de

nous mobiliser dans de telles circonstances. Sommes-nous à ce point désabusés,

fatalistes ou pire, inconscients des drames qui se nouent, pour traiter par l’indifférence,

voire le mépris, la célébration gravissime d’une décennie de violences antijuives sur le

sol républicain ?

Si je m’insurge aujourd’hui, c’est aussi en pensant aux jeunes générations. Près de

32 000 enfants, en France sont scolarisés dans des écoles juives. C’est à la centaine de

groupes scolaires abritant ces enfants qu’incombe, aujourd’hui, la responsabilité du

devoir de mémoire. Lorsqu’ils viennent apprendre à lire, passer leur bac, ou tout

simplement faire de la pâte à modeler, nos fils et nos filles, qu’ils soient des bambins en

couches culottes ou de jeunes adultes, croisent, devant la porte, des militaires en armes.

Et ce parce que des fous islamistes, des barbares nourris de haine dévorante et de

fantasmes antijuifs, fomentent, dans l’ombre, leurs prochains crimes à notre encontre. Il

est donc de la responsabilité de nos établissements scolaires d’instituer un devoir de

mémoire. C’est à nous, à nos institutions pédagogiques, de montrer l’exemple, de ne pas

laisser l’oubli ou l’indifférence anesthésier nos consciences. Nous étudions et prions

dans des forteresses ! Montrons au monde que si nous acceptons, dans un souci de

protection, de telles contingences, nous ne sommes pas pour autant dans la résignation !

Ne nous soumettons pas, ne nous agenouillons pas devant ceux qui veulent nous

anéantir !

Après Charlie, après, l’Hyper Cacher, j’aurai cru, naïf que je suis, qu’il était important de

ne pas laisser le monde, la France, nous oublier : près des 50 % des actes racistes en

France pour l’année 2015 sont des actes antisémites, soit 806 en tout. Cela signifie qu’il

y a chaque jour, 3 actes antisémites perpétrés et encore, c’est sans compter ceux qui,

parce que la victime a peur, reste non déclarés. 3 par jour, et nous représentons moins

de 1 % de la population… Quelques chiffres et tout est dit.

Le testament d’Ilan, c’est notre tragédie et s’il doit servir une cause, c’est celle du réveil

des consciences, de nos consciences. Ilan représente tous ceux que l’horreur antijuive a

massacrés sur notre territoire : DJ Sellam, la Famille Sandler, la petit Myriam

Monsonego, Yohan Cohen, Yoav Hattab, François-Michel Saada, Philippe Braham…

Celui qui fut le premier juif assassiné parce que juif, en France, depuis la fin de la

seconde guerre mondiale durant laquelle six millions de nos frères périrent, ne doit

jamais être oublié. Je rappellerai, pour conclure, ce que tant, en France, voudraient

passer sous silence : 100 % de ces meurtres de juifs en France sont commis par des

individus se réclamant de l’islam. Si nous, juifs de France, avons le devoir de rester en

éveil, les forces de paix et de cohésion sociale, au sein de la communauté musulmane

ont, elles, le devoir de veiller à ce que ce cycle infernal soit rompu. Enfin…

Am Israël Haï

Alain SAYADA

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