Hébron , 12 nov 2015 (AFP) – Des agents
israéliens déguisés en civils et prétendant accompagner une femme enceinte ont
mené un spectaculaire raid jeudi qui a coûté la vie à un Palestinien dans un
hôpital de Judée-Samarie, selon des vidéos de l’établissement et des
responsables.
Le Palestinien a été tué dans des circonstances obscures alors que les
forces israéliennes venaient arrêter un de ses proches soigné dans cet hôpital
de Hébron dans le sud de la Judée-Samarie. Le proche en question était recherché
comme l’auteur d’un attentat au couteau contre un Israélien.
Des images de la vidéosurveillance de l’hôpital montrent un petit groupe
d’hommes et de femmes entrant dans l’établissement et poussant ce qui semble
être une femme enceinte dans un fauteuil roulant. Une vingtaine d’hommes en
civil entrent immédiatement après, passant devant un écriteau indiquant « Cet
hôpital est sous vidéosurveillance ».
Quelques instants après, sur les images d’une autre caméra dans un couloir
contigu, les mêmes hommes en blouson, dissimulés sous le keffieh palestinien,
des capuches, des casquettes ou des bonnets ont sorti des armes de poing et
des fusils qu’ils braquent devant eux en progressant. Parmi eux, la femme
enceinte, peut-être un homme déguisé et visiblement membre de l’équipe, hâte
le pas dans la même direction. Ils paraissent se diriger vers la chambre où se
trouve celui qu’ils recherchent.
La première caméra les montre, huit minutes plus tard, ressortant de
l’hôpital et poussant dans la même chaise roulante, non plus la femme enceinte
mais celui qu’ils ont semble-t-il arrêté.
On ignore ce qui s’est passé entre-temps. Mais c’est dans cet intervalle
qu’Abdallah Azzam Shalaldeh, 27 ans, cousin du suspect, aurait été tué.
Il a été tué par des « moustaaribine », des agents infiltrés des forces de
sécurité israéliennes, détestés des Palestiniens, a indiqué le ministère
palestinien de la Santé.
Ces agents, qui relèvent de l’armée, de la police ou de la sécurité
intérieure (Shin Beth), sont spécialistes des opérations clandestines.
– ‘Il était dans la salle de bains’ –
Sur les lieux, « ils ont interdit au personnel médical de bouger, ont pris
le contrôle du département de chirurgie, sont allés dans la chambre de Azzam
Shalaldeh (le suspect arrêté) et ont empêché quiconque de rentrer », a relaté
le directeur de l’hôpital, Jihad Shawar, auprès de l’AFP.
« Quand ils sont partis, l’homme (le cousin) a été retrouvé couvert de sang.
Ils ont essayé de le sauver mais il est mort », a-t-il ajouté.
Le Shin Beth et l’armée ont expliqué que les forces israéliennes avaient
ouvert le feu quand un proche du suspect a tenté de s’opposer à son
arrestation et les a attaquées.
L’opération visait à arrêter Azzam Shalaldeh, fils d’une famille de
militants du Hamas, a dit le Shin Beth.
Le 25 octobre, Azzam Shalaldeh, 20 ans, a grièvement blessé un Israélien
près de la colonie de Mezad, au nord-est de Hébron, selon le service de
sécurité intérieure. La victime avait réussi à ouvrir le feu sur lui, mais il
avait pu prendre la fuite.
Bilal Shalaldeh, le frère du suspect Azzam et cousin du disparu Abdallah, a
contesté la version israélienne. Il était dans la chambre quand les faits se
sont produits, a-t-il dit à l’AFP.
« Vers 03H00 du matin, des moustaaribine en civil sont entrés armés dans la
chambre, ils ont arrêté mon frère et m’ont attaché. Mon cousin était dans la
salle de bains. Quand il a ouvert la porte, sans aucun mot ou avertissement,
ils lui ont tiré dessus cinq fois », a-t-il relaté. Les agents israéliens ont
empêché le personnel médical de lui porter secours jusqu’à ce qu’ils quittent
la chambre, selon lui.
Pour Amnesty International, « l’assassinat d’un Palestinien de 28 ans par
des forces israéliennes durant un raid dans l’hôpital al-Ahli à Hébron jeudi
matin pourrait être une exécution extrajudiciaire ».
Se basant sur des témoignages, l’ONG remet en question la version
israélienne et demande à Israël « de cesser immédiatement l’utilisation de la
force contre des personnes ne représentant pas de danger immédiat », selon un
communiqué d’Amnesty.
Hébron, poudrière où environ 500 juifs vivent retranchés sous haute
protection militaire parmi 200.000 Palestiniens, concentre l’essentiel de la
vague de violences actuelle entre Palestiniens et Israéliens.
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